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  • Enseigner et évaluer. Regards sur les enjeux éthiques et sociopolitiques dir. by de Joëlle Morrissette et Marie-Françoise Legendre
  • Nancy Bouchard
Enseigner et évaluer. Regards sur les enjeux éthiques et sociopolitiques, s. la dir. de Joëlle Morrissette et Marie-Françoise Legendre, Québec, Presses de l'Université Laval, coll. Vie dans la classe, 2014, 248 p.

Cet ouvrage collectif présente neuf contributions centrées autour d'une même problématique, celle des enjeux éthiques et sociopolitiques de l'évaluation en éducation et en formation. Le lecteur y trouvera un ouvrage cohérent à l'intérieur duquel chaque chapitre apporte une contribution originale à la réflexion sur le sujet.

Dans leur introduction à l'ouvrage, Marie-Françoise Legendre et Joëlle Morrisette considèrent que la montée en puissance de « l'évaluation comme outil de contrôle et de régulation des institutions et des personnes », qui n'épargne pas le milieu de l'éducation, nécessite une vigilance critique et une approche réflexive, ce à quoi nous convient les contributions présentées.

Contrôle, régulation, obligation de résultats, performance, concurrence, mondialisation des marchés, imputabilité des acteurs, bref, les maîtres mots de la logique technicienne de l'évaluation dans nos sociétés occidentales ont atteint le « secteur » de l'éducation. Ce faisant, on assiste à une déformation de la nature même de l'acte d'éduquer—de nourrir et d'élever vers un mieux, un meilleur—pour en faire un acte de normalisation. Selon ces auteures, l'obligation de résultats est si valorisée et priorisée qu'elle commande les politiques éducatives et l'évaluation des élèves comme des enseignant.e.s et directions d'école. Cela a pour effet de nier la diversité culturelle et linguistique dans les grandes enquêtes internationales et d'encourager la standardisation de la formation et de l'éducation. Pour le dire autrement, une norme ISO de l'éducation et de la formation n'est pas si loin, norme où des experts en mesure et évaluation imposeront leurs politiques éducatives aux différents pays. L'évaluation au « service de la concurrence globale » place les acteurs de l'éducation « dans un rapport de dépendance et de sujétion face aux experts, aux règles et aux tests » au lieu de reconnaître qu'il y va de leur responsabilité en la matière. [End Page 161]

« Quand le maître devient le mètre », peut-on lire dans le chapitre de Guy Bourgeault, il y a de quoi s'inquiéter. La capacité critique du praticien est absolument requise en matière d'évaluation, ajoute-t-il, en particulier dans un contexte où on tend à classifier en fonction d'un diagnostic. Pensons par exemple au diagnostic de TDAH (déficit d'attention) qui peut aider à intervenir à condition de ne pas y enfermer l'élève, à condition de s'enquérir de ses goûts, aptitudes et intérêts.

Évaluer c'est juger de la valeur, ajoute-t-il. Il existe donc un lien étroit entre l'éthique et l'évaluation. Pour que le praticien agisse de manière éthique et responsable dans l'acte d'évaluer, il doit pouvoir jouir d'un espace de liberté, être en mesure de répondre de ses décisions et en reconnaître la part d'arbitraire que son jugement évaluatif comporte nécessairement. L'enseignant.e placé.e dans un rapport de sujétion face aux experts, aux règles et aux tests ne peut évaluer librement et de façon responsable.

La rationalité technicienne en évaluation—où les considérations éthiques sont « réglées » d'avance et où évaluer devient une fin en soi—doit être dépassée affirme Denis Jeffrey. Pour être imputable de son évaluation, l'enseignant.e devrait prendre en considération ses doutes, ses inquiétudes, ses hésitations, car ils éclairent le jugement. L'acte même d'évaluer et la décision qui en résulte rend alors son auteur responsable de son jugement. Il en va du sens professionnel de chaque enseignant.e de bien juger, de bien...

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